domingo, 16 de junio de 2013

Déjeuner sur l'herbe


Voilà toute la magie des mots ! Il suffit de les prononcer ou de les tracer sur fond contrasté pour que des feux d’artifice en jaillissent, pour que les associations d’idées fusent, pour que les émotions s’y éveillent, pour que la pensée, à peine sortie de ses draps de soie, se transforme et se pose sans tenue, à découvert comme un papillon sur l’herbe.

Aussi simple que ça ! Assembler des mots comme les pièces d’un puzzle inouï, enfiler des perles multi-couleur, enchaîner des maillons l’un après l’autre, ouvrir un espace avec un trait ou alors remplir un espace d'un son, laisser une trace bien racée.


L’herbe à pelouse, à chat, à pré. L’herbe au chantre, aux ânes, aux chats, aux perles. Couper l’herbe sous le pied, relever une sauce avec des fines herbes. Mauvaise herbe croît toujours. Ingénieur en herbe. Envahi par les herbes. Fouler l’herbe. L’herbe est toujours plus verte dans le pré d’à-côté. Manger son blé en herbe. Manger l’herbe sur pied. Ruminer l’herbe ou son verbe.

Si on avance vers l’Est, à l’extrême, on tombe sur un trésor enseveli sous l’herbe d’une sagesse étonnamment verte : « Le redoutable dragon ne l’emporte pas sur le serpent lové dans l’herbe ». « Immobile, assis sans rien faire, le printemps vient, l’herbe pousse ». « Chaque maladie a une herbe pour la guérir ».

Parmi ces merveilles, quelques éclairs de lucidité parcourent un ciel fraîchement dégarni :
-       风行草靡Le vent souffle, l’herbe s’envole. Trop simple pour notre esprit éclairé par des lumières aux reflets logiques et méthodiques. Métaphore filée tout en subtilité : la force démesurée vient à bout de tout. Poésie emprisonnée par la raison débridée. Un regret, une larme tendue sur une droite intransigeante. Le sens linéaire a meurtri l’aisance curviligne.
-       百草权舆L’herbe bourgeonne. Encore une image haute en couleur pour annoncer le printemps qui se fait attendre.
-       春晖寸草Etymologie qui reprend les soldats sous le soleil printanier et un tantinet d’herbe. Cette vision guerrière, source de l’inspiration chinoise, a muté dans le temps. Le soleil printanier s’est transformé en amour parental, la langue chinoise est poésie, nul besoin de maquillage, elle est en soi magie de la prose en quatrain. Quant à la portion congrue d’herbe, elle devient l’infini. Amour inconditionnel renversé. Les pas de Confucius sur l’herbe laissent une trace de piété filiale et remettent de l’ordre dans chaque relation. Le chaos ne sera pas.

Voyage à l’ouest, 
    voyage de retour 
       sans détour. 
          Sur une toile 
               quasi-mythique 
                  un pique-nique 
                       peu pudique. 

Sur un fond sombre se dessine une forme de lumière qui a le culot de fixer l’observateur que nous sommes dans un geste naturel. Un doigt pointé vers le sujet de discorde, encore une histoire de pomme, sans regard. 

Le noir sert à définir le nu. 
« Cacher ce sein que je ne saurais voir ! » 
Mot d’ordre lancé au détriment d’un œil inquisiteur. 
Il fallait être aux rangs des refusés 
pour pouvoir arborer le pur 
au grand dam des esprits obscurs. 
On crie alors au scandale. 
Un voyeur. 
Du jamais vu ! 

Et pourtant, nombres de corps dénudés s’exposent au Louvre. Mais le Louvre c’est autre chose. Le jeu, voici la réponse. Jouer avec les contrastes, les formes libres de toute connotation. La voie est libre pour l’abstraction. S’abstraire dans ses pensées. Prendre les plans, les replacer, les déplacer. Puis les pans de lumière à grand renfort de noirceur. Qu’il fait bon se laisser aller à l’allégorie !

À la tienne !

1 comentario:

  1. Vague souvenir de déjà vu... Bien sûr ! Sa peau blanche en contraste avec le noir des costumes. Ah ! A quand l'émancipation des hommes ?

    ResponderEliminar

A vous de jouer... Les dés sont jetés.

La louve

Ecrivons sur la page Pendant que la mer dégage Si la mère enrage Elle effacera toutes les pages