Voilà toute
la magie des mots ! Il suffit de les prononcer ou de les tracer sur fond contrasté
pour que des feux d’artifice en jaillissent, pour que les associations d’idées
fusent, pour que les émotions s’y éveillent, pour que la pensée, à peine sortie
de ses draps de soie, se transforme et se pose sans tenue, à découvert comme un
papillon sur l’herbe.
Aussi
simple que ça ! Assembler des mots comme les pièces d’un puzzle inouï,
enfiler des perles multi-couleur, enchaîner des maillons l’un après l’autre,
ouvrir un espace avec un trait ou alors remplir un espace d'un son, laisser
une trace bien racée.
L’herbe à
pelouse, à chat, à pré. L’herbe au chantre, aux ânes, aux chats, aux perles.
Couper l’herbe sous le pied, relever une sauce avec des fines herbes. Mauvaise
herbe croît toujours. Ingénieur en herbe. Envahi par les herbes. Fouler
l’herbe. L’herbe est toujours plus verte dans le pré d’à-côté. Manger son blé
en herbe. Manger l’herbe sur pied. Ruminer l’herbe ou son verbe.
Si on avance
vers l’Est, à l’extrême, on tombe sur un trésor enseveli sous l’herbe d’une
sagesse étonnamment verte : « Le redoutable dragon ne l’emporte pas
sur le serpent lové dans l’herbe ». « Immobile, assis sans rien
faire, le printemps vient, l’herbe pousse ». « Chaque maladie a une
herbe pour la guérir ».
Parmi ces merveilles, quelques éclairs de lucidité parcourent un ciel fraîchement
dégarni :
-
风行草靡。Le vent souffle, l’herbe s’envole. Trop simple pour notre esprit éclairé
par des lumières aux reflets logiques et méthodiques. Métaphore filée tout en
subtilité : la force démesurée vient à bout de tout. Poésie emprisonnée
par la raison débridée. Un regret, une larme tendue sur une droite
intransigeante. Le sens linéaire a meurtri l’aisance curviligne.
-
百草权舆。L’herbe bourgeonne. Encore une image haute en couleur pour annoncer le
printemps qui se fait attendre.
-
春晖寸草。Etymologie qui reprend les soldats sous le soleil printanier et un
tantinet d’herbe. Cette vision guerrière, source de l’inspiration chinoise, a
muté dans le temps. Le soleil printanier s’est transformé en amour parental, la
langue chinoise est poésie, nul besoin de maquillage, elle est en soi magie de
la prose en quatrain. Quant à la portion congrue d’herbe, elle devient l’infini.
Amour inconditionnel renversé. Les pas de Confucius sur l’herbe laissent une
trace de piété filiale et remettent de l’ordre dans chaque relation. Le chaos
ne sera pas.
Voyage à
l’ouest,
voyage de retour
sans détour.
Sur une toile
quasi-mythique
un pique-nique
peu pudique.
Sur un fond sombre se dessine une forme de lumière qui a le culot
de fixer l’observateur que nous sommes dans un geste naturel. Un doigt pointé
vers le sujet de discorde, encore une histoire de pomme, sans regard.
Le noir sert
à définir le nu.
« Cacher ce sein que je ne saurais voir ! »
Mot
d’ordre lancé au détriment d’un œil inquisiteur.
Il fallait être aux rangs des
refusés
pour pouvoir arborer le pur
au grand dam des esprits obscurs.
On crie
alors au scandale.
Un voyeur.
Du jamais vu !
Et pourtant, nombres de corps
dénudés s’exposent au Louvre. Mais le Louvre c’est autre chose. Le jeu, voici
la réponse. Jouer avec les contrastes, les formes libres de toute connotation.
La voie est libre pour l’abstraction. S’abstraire dans ses pensées. Prendre les
plans, les replacer, les déplacer. Puis les pans de lumière à grand renfort de
noirceur. Qu’il fait bon se laisser aller à l’allégorie !
À la
tienne !
Vague souvenir de déjà vu... Bien sûr ! Sa peau blanche en contraste avec le noir des costumes. Ah ! A quand l'émancipation des hommes ?
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